Catégorie: Ecriture
février 27th, 2013 par Jean Sebillotte
Désirant travailler le graphisme de façon à marier images et texte (surtout de poésie) — dans un souci d’extrême pureté de la forme —, j’ai décidé de marier le noir, l’or et l’argent et ai expérimenté cette façon de travailler sur des modèles vivants.
Voici ce que donnent ces essais, tous de format 21×29.7 cm



Publié dans Dessins, Ecriture, Peinture, Poesie Etiquette: argent, dessin, graphisme, illustration, noir, noir-or-argent, or
février 27th, 2013 par Jean Sebillotte

OUVRAGE DE DAME d’Annalisa Comes
(aide à la traduction d’Yves Le Bris)
J’ai lu à plusieurs reprises ce livre qui m’avait attiré l’autre jour à La Vagabonde et qui m’est dédicacé. Trente trois poèmes. Sur la page de gauche la version italienne (la langue de l’auteure), sur la page de droite la traduction française. Parfois des titres, parfois rien qu’un nombre en chiffres romains (sauf pour le premier poème où il n’y a rien).
Qui suis-je pour parler d’un tel livre ? Ma réponse : un lecteur qui, lui aussi, s’efforce de traduire en poésie sentiments, impressions, paysages, instants, etc., un lecteur séduit par la musique des mots, surtout ici en italien, un lecteur étonné par le caractère déroutant de ces poèmes courts, elliptiques où la poète s’exprime de façon allusive en vers résolument libres dans une poésie libre aussi de toute règle apparente, mais d’où se dégage un style.
Des poèmes qui expriment la relation du je, du moi, avec ce tu, ce toi qui devient parfois (rarement) il, chaque poème étant comme un moment suspendu que vit celle qui évoque l’autre et leur relation.
Le lecteur ne peut qu’être surpris par de multiples variations de forme :
– la longueur inégale des poèmes,
– l’emploi de deux temps dans la même page,
– le pluriel soudain apparu :
ne piango sommessa j’en pleure à basse voix
le figure scomposte les figures décomposées
– le sens qui se perd (ce qui est habituel) :
il cortle dei monti la cour des monts
che si sperde qui nous perd
aggrigendo i cappelli grisonnant les cheveux
sempre toujours
– le regard qui change,
– l’apparition soudaine d’une virgule, d’un tiret, de deux tirets, de deux points, d’une majuscule, dans des poèmes sans ponctuation,
– l’emploi très souvent de l’infinitif,
– l’absence d’article ou d’adverbe, moi j’aurais écrit :
a te (di) liberare (l’)azzura dei capelli à toi(de)dépêtrer(le) bleu des cheveux
la cerniera della mia azzura la charnière de mon bleu
collana collier
– le heurt voulu parfois des mots ; moi, dans le poème d’au-dessus, j’aurais, comme la traduction, écrit :
la cernera della mia collana azzura !
*
A Annalisa ces vers qu’elle m’inspire :
Elle à l’ouvrage
Cachée dans le bleu du poème
Entre les murs de livres
Et lui ?
Jean Sebillotte (26 janvier 2013)
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février 23rd, 2013 par Jean Sebillotte
L’Echo des Nouettes, sur le quel j’ai déjà écrit dans ce blog, a consacré son dossier à la lecture. J’en étais co-auteur. Voici un des articles qui se veut portrait d’une lectrice mis en parallèle avec neuf groupes de lectures recensés dans le quartier.
La lecture « plaisir solitaire ? »
Notre lectrice, que nous appellerons M., propose elle-même cette expression en souriant, au cours des deux grandes heures passées à échanger sur livres et lectures.
Plaisir…
M. le prend dans des livres appréciés au regard de multiples critères, le style en premier lieu, puis la réflexion ou le regard posé sur le monde actuel et l’exploration de mondes inventés ou de pays réels de toutes sortes. L’histoire, l’intrigue comptent aussi. Parfois l’auteur agace par ses partis pris. Depuis peu M. peut abandonner un livre en cours de route, ce qui est une liberté conquise sur la révérence passée qu’elle accordait aux auteurs !
A ces critères correspondent un grand nombre d’auteurs français et étrangers ? En réalité nous évoquons essentiellement des auteurs étrangers écrivant des romans « traditionnels », de la science-fiction, et de la fantasy, des romans policiers. Citons pêle-mêle Cormac Mac Carthy, Jonathan Coe, Jane Austen, K. Blixen, Mankell, E. Georges, Doris Lessing, S. King, Herbert de « Dunes, » le groupe de Missoula, Toni Morisson… Inutile d’évoquer les livres rejetés ! Notre lectrice assume ses choix qu’elle juge « éclectiques » et personnels.
…Solitaire
Parler de livres, échanger, conseiller, quel plaisir, mais participer à un groupe de lecture ? Inutile. A raison d’un livre par semaine, M. a amplement de quoi lire et n’a pas besoin d’être incitée à ouvrir un bouquin !
N’a-t-elle pas hérité de la soif de lecture de sa famille et ne l’a-t-elle pas pratiquée dès l’enfance, à la lampe de poche sous ses draps pour échapper à l’œil parental ? Après les ouvrages enfantins et ceux des bibliothèques accessibles, il y eut ceux que son père (en province alors) faisait venir, les Dumas, Orczy, Cooper, puis plus tard les Kessel, Vercel, Kipling, Dickens. Il y eut l’attrait du fuit défendu, soustrait au père, le « J’irai cracher sur vos tombes » de B. Vian,
« L’heure joyeuse » a joué un grand rôle dans son passé de lectrice à Versailles. Il y eut là ce moment béni où M. se sentit appartenir à une communauté en lisant dans un ouvrage la mention d’un livre déjà lu ! Est-on solitaire avec ce sentiment de communier avec tant d’autres dans la même passion, le même besoin ?
Et le livre ?
Objet culte, irremplaçable, acheté de façon compulsive à la FNAC ou ailleurs (d’où l’intérêt de la bibliothèque de la Maison de Quartier pour éviter l’orgie), décliné en cinq-six bouquins à avoir près de soi en permanence, le livre est l’alcool du lecteur, son addiction.
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janvier 20th, 2013 par Jean Sebillotte
Ce premier roman d’Emmanuelle Guattari, très court, se lit très vite, l’auteur adoptant le point de vue de l’enfant qui ne retient de son passé que des bribes. Le livre nous livre des anecdotes, des sentiments, des visions enfantines qui, accolées, finissent par nous donner l’atmosphère très particulière de ce monde où elle a passé sa petite enfance. La force de la romancière est de rester allusive et de ne chercher, à aucun moment, une quelconque morale ou une philosophie relative à son existence. Il y avait les « Fous, » les non-Fous, et les enfants et elle parmi eux.
La 4ème de couverture fournit le contexte. Est-elle nécessaire ? Elle nous apprend que l’auteur est la fille d’un type étonnant, ayant une grande notoriété et que le roman est probablement très autobiographique. Sans ces précisions, le livre aurait-il perdu de sa force ? Je ne saurais le dire. Il aurait gagné en mystère. Certaines figures en auraient-elles pâti ? Auraient-elles perdu leur force ? Je ne le crois pas comme ce père, cette « Tanche, » cette mère adorée, ce frère, cette belle-mère dont on ne sait rien si ce n’est qu’elle a existé et qu’elle devait aimer outre le père, les enfants qu’il lui avait imposés, etc.
Certains critiques sautent à pieds joints sur cette question et utilisent cette dernière page de couverture, mais pas ceux dont le texte est repris ci-dessous.
Jean S
Quelques critiques
Le point de vue de Fabienne Bussaglia de Télérama est bref : Emmanuelle Guattari signe un roman virtuose sur un paradis perdu : la clinique de La Borde, établissement psychiatrique hors norme fondé par son père, Félix Guattari
Celui de Marine Landrot, dans Télérama aussi, est plus détaillé : Une ou deux pages à peine, parfois quelques lignes : chaque chapitre ressemble à un lambeau d’écorce gravé au canif. Emmanuelle Guattari est avant tout écrivain, comme ce premier roman ravageur le révèle…
Petite, Emmanuelle a donc grandi dans ce château du fou au bois dormant, emplissant ses poches de petits cailloux qu’elle dissémine aujourd’hui avec une virtuosité féerique. Aussi effrayants qu’envoûtants, les souvenirs qu’elle a gardés de ce paradis perdu sont en effet dignes d’un conte de fées…
Ecrit à la première personne, son livre va et vient, avance et recule, scrute et s’enfuit. La beauté de ce récit vient des entailles qui le creusent petit à petit. Il n’y a pas de nostalgie dans cette confession autobiographique, élastique jusqu’à l’arrachement. Les petits miracles décrits en flashs aveuglants cachent un souhait impossible, émis dans un chapitre totalement différent des autres, éploré, à vif, le plus beau du livre : faire revivre la mère disparue.
Florence Bouchy, dans Le Monde écrit : Comment perçoit-on, quand on est enfant, cette vie avec les malades mentaux ? Comme une expérience de liberté dont l’écrivain fait, pour son premier roman, un paradis perdu.
Pour plus d’analyses voir http://www.lechoixdeslibraires.com/livre-120312-la-petite-borde.htm
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janvier 19th, 2013 par Jean Sebillotte
Faisant partie d’un atelier de lecture fort sympathique— que je vous présenterai davantage quand notre journal de quartier, L’Echo des Nouettes, déjà mentionné ici en 2012, sera tiré et diffusé — j’ai bénéficié de séquences d’écriture. Plus récemment, je me suis inscrit dans un atelier qui venait d’ouvrir à Versailles à la librairie La Vagabonde. Je ne peux qu’encourager ceux que cela intéresserait à participer à de tels groupes. Il en existe beaucoup plus qu’on ne croit !
Voici un premier résultat que je vous livre ici. Il s’agissait d’écrire brièvement sur un objet tiré à l’aveugle d’un sac. Il y eut des textes très originaux et très divers. Voici le mien qui bénéficia d’observations fort pertinentes.
Coquille Saint-Jacques
Hommage aux écrivains brefs
On trouve la coquille de ce bivalve à l’étal des poissonniers, remplie de son fruit ― vivant muscle blanc orné d’un corail orange. Avec ses compagnes tapies au fond de la mer elle est pêchée à la drague du côté de Cherbourg.
Une fois ôté et jeté le couvercle de sa double cuirasse, notre plaisir est de déguster le mollusque, revenu à la poêle avec de l’endive finement coupée (cuisson légère et délicate), et replacé dans la coquille du dessous. Celle-ci est nettoyée après le repas et rangée. On ne sait jamais : elle peut resservir, ne serait-ce que de cendrier.
Regardez-la cette vasque qui a son avers et son revers, comme une pièce de monnaie ― je me demande si elle n’a pas servi à commercer dans les temps anciens―. La partie extérieure, posée au fond de l’eau, combine un triangle bombé et rainuré, bordé d’un large cercle, et un rectangle plat, support de la charnière qui réunit ce fond creux et le couvercle plat, ignoré ici, tous deux protégeant ce fruit délicat de la mer. La couleur extérieure de cette carapace est bigarrée alliant le blanc et l’ocre rouge. L’intérieur est le brillant berceau nacré de ce mets de choix.
Oh ! Coquille, petite coque ou erreur typographique que le correcteur a laissé passer, que tu as été utile au graphiste qui a fait de toi l’emblème d’une des plus puissantes des multinationales du monde : la Royal Deutch Shell (Shell et coquille sont, pour nos cousins d’au-delà de la Manche, une même chose).
Si l’on remonte le temps et l’on te donne ton nom véritable, te voici compagne des pèlerins le long des chemins qui les mènent à Compostelle.
Que de choses il y aurait à dire encore ! Mais le temps me manque et je crains de vous lasser.
Jean Sebillotte 
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