Catégorie: Lecture

novembre 13th, 2016 par Jean Sebillotte

D’abord, pourquoi lire ?  saint-simon-memoiresJe propose un détour : pourquoi écrire ? Une de mes réponses est que j’écris pour explorer le monde. Cela vaut surtout pour mes romans qui me permettent d’approfondir un aspect de la réalité et même de créer un ajout imaginaire à cette réalité. Un roman appartient au monde, ne serait-ce que parce que la Bibliothèque nationale en garde deux exemplaires… Fred, pour moi, fait partie du monde comme la famille Dautheuil. N’en est-il pas de même pour la lecture qui permet, elle aussi, d’explorer le monde ?

Pourquoi lire Saint-Simon, duc et pair ? C’est se plonger dans la vie de la cour du roi Louis XIV puis du Régent. C’est suivre la démarche d’un homme qui voulait que son propre monde subsiste et que nous en partagions la mémoire. Qui n’est pas intéressé par l’histoire de France perdra peut-être le sel de ces Mémoires. Mais, peut-être, peut-on lire Saint-Simon simplement pour se régaler de son fameux style.

Lire Saint-Simon c’est aussi satisfaire un libraire fort sympathique chez qui j’ai trouvé l’anthologie dont il m’a fortement conseillé la lecture. Grâce à lui, j’ai réparé partiellement une lacune de ma formation littéraire qui a été fort incomplète et que, sur le tard, je m’efforce de compléter comme certains de mes proches qui à un âge avancé continuent à perfectionner leur langue anglaise, espagnole ou allemande.

J’ai commencé le bouquin par le milieu au moment où le duc nous conte la mort de la Dauphine puis celle du Dauphin qui lui étaient très proches, une mort terrible aussi, à divers égards, pour le Roi, pour la cour, une mort qui a privé la France de successeurs destinés à devenir roi et reine de France, formés pour cela, une mort qui a conduit à une régence, le futur Louis XV étant bien jeune.

Je ne pensais pas être pris à ce point par ma lecture. C’est dû au fond bien sûr, mais probablement  plus encore au style que l’on m’avait vanté. Qui suis-je pour qualifier ce style qui n’a d’égal selon les Goncourt que celui de la Bible  et des auteurs latins ? « Saint-Simon ? Un des grands stylistes avec Proust » m’a dit une amie fort compétente dans le domaine. Dans la préface de l’anthologie, François Ravez cite un certain nombre d’admirateurs de Saint-Simon : Chateaubriand, Hugo, Balzac, Michelet, Sainte-Beuve, Flaubert, les frères Goncourt, Stendhal ( «… les épinards et Saint-Simon ont été mes goûts durables »). Proust « fera des Mémoires l’un des textes-sources de La Recherche », écrit le préfacier qui cite aussi Valéry écrivant : « Dans une clandestinité absolue…, Saint-Simon invente pour ses Mémoires cette langue extraordinaire dont la morsure et les longues phrases, formées d’étonnants raccourcis, émerveilleront les connaisseurs de l’avenir ».

Après cela, comment pourriez-vous ne pas lire au moins cette anthologie, qui n’a que 1478 pages,  à défaut des huit tomes de la Pléiade ?

Jean Sebillotte

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août 21st, 2016 par Jean Sebillotte

Mme Proust E Bloch DanoD’Évelyne Bloch-Dano, je n’ai lu que deux biographies, celle de Madame Zola et celle de Madame Proust. Elle m’ont vivement intéressé à chaque fois. On découvre un auteur et son monde par l’histoire d’une personne qui lui est toute proche. Passionnant. Je suggère cette lecture aux curieux. Quant à l’auteur, pourquoi ne pas aller sur son site :  http://www.ebloch-dano.com ? Je ne me vois pas établir la biographie de Madame Bloch-Dano !

JS

PS- Je n’imaginais pas combien Proust avait dépendu de sa mère. Et réciproquement… En outre, le livre nous présente le milieu dans lequel ont vécu la mère et le fils.

 

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août 9th, 2016 par Jean Sebillotte

Cher ami,

À mon tour de commenter un de vos livres. L’Herbier m’est bien parvenu. J’ai profité d’une semaine en Espagne pour le lire page après page. Le livre s’y prête par sa forme même. On suit l’histoire de cette famille qui est décrite pour aboutir au fils, dont je n’ai pas trouvé le prénom, qui, à la fin, reste seul dans la maison des parents, sur le dessus de la terre, ses parents étant désormais en-dessous…

« Le petit a grandi, il essaie de comprendre pourquoi Roger et Colette s’aiment et se haïssent, en même temps. » Effet de typo et de style. Le style. Vous m’aviez suggéré d’en mettre davantage pour le second roman, je crois. Dans L’Herbier, il est remarquable et je suis tombé  sur de multiples trouvailles qui m’ont plu et parfois étonné.

Le livre n’est ni gai ni optimiste. Il est même cruel. La vie vaut-elle d’être vécue ? Dieu ne répond pas, existe-t-il ? La destination est le cimetière. La vieillesse peut être un terrible naufrage. Le père apprend à l’enfant à faire un herbier, « doux cimetière de la nature morte ».

« On est heureux pour quelques heures, ou un peu moins malheureux »… « Croient-ils pouvoir être heureux ensemble » ?

« Heureusement il reste les mots »… « pour un  avenir vertigineux ».

*

C’est, pour moi, un beau livre que j’ai quitté pensif, d’autant que je lisais en même temps Les âmes grises tout aussi sombre.

Merci

Jean S.

 

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juillet 21st, 2016 par Jean Sebillotte

 

 

Ce livre lu dans ma jeunesse, en 1956, à un moment de maladie, de fatigue extrême et de stress, m’avait fait grande impression, comme le film célèbre de Bresson. Une amie, Monique Gosselin, universitaire spécialiste de Bernanos, a écrit récemment un essai approfondi, « Bernanos romancier du surnaturel » aux Éditions Pierre Guillaume de Roux, où elle rend compte de la modernité de six des œuvres de Bernanos « jugées souvent désuètes » qui « peuvent cependant toucher les lecteurs d’aujourd’hui, fussent-ils étrangers au catholicisme, voire au message chrétien ».

Livre Monique Gosselin.netLa relecture m’a plu. Mais il est vrai que j’ai été imbibé de religion catholique. J’en sais les fondements, les rites, la place de la hiérarchie et des clercs, donc d’un curé, dans l’Église.

Ce qui m’a frappé est la qualité de l’écriture. Ce qui fascine aussi c’est le personnage de ce prêtre « au douloureux itinéraire… vers une sainteté qui s’ignore ». Le livre peut rebuter. Il a vieilli quand il décrit la vie institutionnelle et humaine du curé d’une petite paroisse rurale dans les années 30. Il demeure vigoureux pour quiconque se sent concerné par le « surnaturel », le bien, le mal, le péché, la mort, la grâce… le Christ et son message…

Le curé d’Ambricourt est un être pur, qui se heurte à lui-même, à ses paroissiens et à leur manque de foi, au monde et aux compromissions de l’Église.

Je suis incapable, ici, de résumer un tel livre. Lisez-le ! Ensuite lisez Monique Gosselin. Ou inversement !

JS

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juin 5th, 2016 par Jean Sebillotte

Ce poète irakien d’origine a lu certaines de ses oeuvres au siège de Colori tempi en fin mai. C’était l’occasion de le découvrir. « Bagdad ce qu’il reste de lumière » était le titre du duo alliant des pièces de violoncelle et des poèmes. Deux interprètes. Catherine Warnier au violoncelle, jouant du Bach – Ah les suites pour violoncelle seul -, du Schumman, du Bloch, des musiques traditionnelles ; Salah Al Hamdani étant la voix du poète lisant certaines de ses œuvres avec parfois un court passage en arabe.

Je rêve SalahParmi ses lectures, Salah lit des extraits de « Je te rêve ».  Ce long poème, unique objet d’un petit livre illustré par Sylvain Boisel, commence ainsi :

Nos mains restées sur le feu

N’ont pas ramené l’été

À la tourterelle gelée dans la peine

 

J e te rêve

À perte de vue

Les saisons meurent de sommeil

Un silence avec des lèvres sur tes paupières

 

Je te rêve

La voix laboure l’attente

Et dépoussière les sentiments

Au creux des mots…..

 

Voici un extrait de la quatrième de couverture. 

Salah Je te rêve

 

L’oeuvre Salah est abondante, avec des poèmes parfois écrits en arabe et traduits en français avec I. Lagny. Parmi les recueils, j’ai été tenté par « Pluie de Juillet » écrit en français et en italien (traduction de V.Napolitano – dessins de Selim Abdullah). Voici le début d’un poème énigmatique et beau.

Tout ceci

Ce bout de crépuscule

Que tu trimballe dans l’errance de l’instant

…………

Tutto questo

Questo frammento di crepusculo

Ché tracini con ten el vagabondare dell’instante

………..

Un poète à lire et à écouter ! Un artiste très complet ! Découvrez-le aussi sur wikipedia : https://fr.wikipedia.org/wiki/Salah_Al_Hamdani

JS

 

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