Catégorie: Poesie

février 11th, 2014 par Jean Sebillotte

Éric Chevillard écrit, dans Le Monde des livres du 7 février 2014, un article fort drôle sur le dernier livre de Christian Bobin (Gallimard). Ayant rédigé, moi-même, un article sur ce blog en mars 2013 à propos du livre précédent de cet auteur, j’ai été amusé par le texte de Chevillard  qui dénonce,  avec sa « mauvaise ironie, » dit-il, la façon dont l’auteur, Frère lumière, chante la vie, ce à quoi il « s’efforce de puis son premier livre. »

Que ceci ne vous empêche pas de lire ce bouquin, mais en relativise la facilité. Celle-ci ne choque pas au premier livre ! Il faut dire que Bobin est un poète qui a parfois des audaces étonnantes que relève notre journaliste :  Le papillon monte au ciel en titubant comme un ivrogne. C’est la bonne façon.  Ou ceci : Il n’y a pas un instant où je ne cherche une pierre pour aiguiser l’œil.

Chevillard dénonce des bonbons de guimauve comme ceux-ci : Le ciel est un torrent qui se jette dans l’amour de Dieu. Bach compte les étincelles sur ce torrent qui coule dans l’infini ouvert d’un cœur dément.

 Il enfonce le clou en notant quelque part que « Tant de clarté nous brûle les yeux. Nous n’y voyons plus rien et l’auteur en profite pour écrire n’importe quoi. »Il conclut son article ainsi : « Christian Bobin s’enchante tout seul, il cherche l’innocence et la grâce dans une langue que l’homme a conçue pour reprendre la main sur la création, pour en chasser les dieux, pour ordonner le monde lui-même, pour substituer la poésie à l’ennui sans fin de la lumière. »

Il est vrai que Christian B. est avant tout un poète. Et c’est avec une certaine tendresse, me semble-t-il que le journaliste lui consacre un très long article qui prouve qu’il a lu à fond ce dernier bouquin.

Jean Sebillotte

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janvier 26th, 2014 par Jean Sebillotte

On croit innover…Et pourtant le calligramme n’est pas une invention récente. Selon wikipedia qui est bien commode, les premiers seraient attribuées au poète grec Simmias de Rhodes.  On passe au IXe puis à Rabelais au XVIe (sa dive bouteille) puis au XIXe puis à Guillaume Appolinaire. Il semblerait qu’il faille au lecteur « chercher le sens et la direction des phrases, chose qui paraît évidente dans un texte classique. »

Dans ce texte composé récemment, le sens est assez surréel, mais le forme suggestive, j’espère.

                                                                                                Verseur de vers

Le sévère travers des pervers déversés dans le vermouth

Le vertige vertueux du trouvère versificateur

Le revers de l’avers de ce vert verbeux

La verveine versée dans le verre

Et le verbiage en verlan

Et la vertu du verbe

Et le vermisseau

Et le verseau

Versatile

Dévers

Et persévère

Le vertige verdi du verre versant

 

                            Jean Sebillotte 2013-2014

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janvier 1st, 2014 par Jean Sebillotte

Le nouveau recueil de poésie d’Annalisa Comes a été publié il y a peu par l’Harmattan. J’avais longuement évoqué son Ouvrage de dame dans un article de février 2013.

Ici, je serai plus bref. Je reproduis tout d’abord un premier poème que j’ai aimé. Il attirera, je l’espère, l’attention du lecteur…

Ancora in Occidente
Di colpo alberi, folate del vento
Contro le candele
e ondate, senza dare la mano.
La schiuma è un lievito leggere.

Encore en Occident
D’un coup arbres, rafales de vent
Contre les bougies
Et vagues, sans donner la main.
L’écume est une levure légère.

Comme dans Ouvrage de dame, on lit, à gauche, le texte italien, c’est-à-dire l’original, et, à droite, le texte traduit en français.

Ce nouvel opus est plus concret que le précédent, les textes sont moins allusifs et souvent plus longs. L’eau en fait l’unité générale comme l’illustration de Fred Charap dont les dessins en noir et blanc accompagnent le livre. Le noir intense des originaux a malheureusement disparu à l’impression, à l’exception de l’image qui orne la couverture, ce voilier perdu dans l’immensité grenue.

Dommage, et tant pis. Car nous restent 73 poésies regroupées sous le titre général, Hors terre ferme, avec en guise de seconde partie : Mer & autres eaux.

Ces poèmes sont d’abord à lire en italien, me semble-t-il, dans cette langue chantante qu’Annalisa Comes a utilisée pour nous présenter son œuvre le neuf décembre dernier à Paris. À défaut, commencer par le français…

Pour mon plaisir et, je l’espère, le vôtre, voici un fragment de L’Île aux moines :


In questo paese piatto

Dove tutto è riva

I gabbianni si arrampicano col loro fischio da bollitore

Dans ce pays plat
Où tout est rive
Les goélands montent avec leur sifflet de bouilloire

Jean Sebillotte

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novembre 15th, 2013 par Jean Sebillotte

A l’occasion du 24e anniversaire de la Convention Internationale des Droits de l’Enfant, l’association Rencontres européennes- Europoésie a organisé un concours de poésie, conte et nouvelle au profit du Comité de Paris de l’UNICEF, sur deux thèmes, l’un sur l’enfance (son aide, sa protection) l’autre libre. J’ai eu le plaisir que deux des trois poèmes que j’avais envoyés soient primés. Les voici :

Ferons-nous jamais assez ?

Oserons- nous jamais assez

Les gestes qui feront l’enfant

Plus chanceux que ses parents ?

*

Toi

De tes yeux la caresse

De tes mains la tendresse

Mon doux galet

Ma lumière vibrante

Ta chair, ta joie et tes peines

Et mon désir tout nu

Ils paraîtront dans une anthologie qui sera vendue au profit de l’UNICEF.

http://europoesie.centerblog.net/

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août 30th, 2013 par Jean Sebillotte

Durant les vacances, j’ai, à partir d’un fait réel, écrit la première fable. La seconde a suivi en réponse au défi qu’on me lança.

 

Le chat et la grenouille

 Un chat fixe de ses yeux verts

Une grenouille béate.

Le félin, un rien pervers,

Guette sans hâte,

Le batracien, inconscient du danger,

Qui se repose, tel une plante.

D’un bond, sans déranger,

Le chasseur s’empare de la bête trop lente,

Puis, d’un air majestueux,

L’animal au pelage fastueux,

S’en va, en un secret endroit,

cacher ou manger sa proie.

 

Si vous êtes grenouille,

Ne jouez pas au pacha.

Et si vous êtes chat,

Évitez d’être bredouille.

 

Le frelon, la guêpe et l’abeille

Un frelon, empereur des insectes ailés,

Avec une guêpe voulut convoler.

La belle ainsi courtisée,

Refoule l’assaut d’un dard zélé,

Et, en retour, reçoit une giclée 

Du venin de son amant !

 

Une abeille sagace et avisée

Commenta prestement

L’affaire en ces termes :

« Pour que l’union soit heureuse et ferme,

Il convient de ne pas changer d’espèce.

Ainsi vous le diront le mulet et le bardot

Qui comme des badauds

Paissent,

Là-bas, dans la plaine.

Ils sont tristes d’être bâtards

Et de ne pouvoir espérer, même avec retard,

Une descendance lointaine. »

 

                                   Jean Sebillotte – août 2013

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