Catégorie: Lecture
février 11th, 2014 par Jean Sebillotte
Éric Chevillard écrit, dans Le Monde des livres du 7 février 2014, un article fort drôle sur le dernier livre de Christian Bobin (Gallimard). Ayant rédigé, moi-même, un article sur ce blog en mars 2013 à propos du livre précédent de cet auteur, j’ai été amusé par le texte de Chevillard qui dénonce, avec sa « mauvaise ironie, » dit-il, la façon dont l’auteur, Frère lumière, chante la vie, ce à quoi il « s’efforce de puis son premier livre. »
Que ceci ne vous empêche pas de lire ce bouquin, mais en relativise la facilité. Celle-ci ne choque pas au premier livre ! Il faut dire que Bobin est un poète qui a parfois des audaces étonnantes que relève notre journaliste : Le papillon monte au ciel en titubant comme un ivrogne. C’est la bonne façon. Ou ceci : Il n’y a pas un instant où je ne cherche une pierre pour aiguiser l’œil.
Chevillard dénonce des bonbons de guimauve comme ceux-ci : Le ciel est un torrent qui se jette dans l’amour de Dieu. Bach compte les étincelles sur ce torrent qui coule dans l’infini ouvert d’un cœur dément.
Il enfonce le clou en notant quelque part que « Tant de clarté nous brûle les yeux. Nous n’y voyons plus rien et l’auteur en profite pour écrire n’importe quoi. »Il conclut son article ainsi : « Christian Bobin s’enchante tout seul, il cherche l’innocence et la grâce dans une langue que l’homme a conçue pour reprendre la main sur la création, pour en chasser les dieux, pour ordonner le monde lui-même, pour substituer la poésie à l’ennui sans fin de la lumière. »
Il est vrai que Christian B. est avant tout un poète. Et c’est avec une certaine tendresse, me semble-t-il que le journaliste lui consacre un très long article qui prouve qu’il a lu à fond ce dernier bouquin.
Jean Sebillotte
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octobre 13th, 2013 par Jean Sebillotte
Assis devant mon bol, dans le matin tranquille, je regarde le tableau que m’offre mon jardin et le clair soleil du matin.
Son cadre est fourni par la fenêtre qui entoure une des vitres du bas. Au centre, à peine strié le tronc du bouleau pleureur que la lumière partage en deux parties, la blanche et la grise qui marque l’ombre. En haut la frange des feuilles encore vertes de l’arbre. Dans le fond, le vert bigarré de la haie vive faite de charmes et de noisetiers. À gauche, le vif bouquet des petites fleurs d’un rosier rouge ; plus à gauche, la gerbe des grandes tiges de l’anémone du Japon qui va quêter le soleil et s’offrir à lui, en envoyant en avant-garde ses fleurs d’un mauve clair. Je devine le gazon. Plus à gauche encore, formant masque, le vert très sombre du chèvrefeuille que je sais accroché au mur que je vois pas. Formant croix avec le tronc, juste derrière la fenêtre, la barre blanche d’appui soutenue par les volutes qui l’ornent.
Je fais un croquis rapide, imparfait et sans couleur du tableau qui va s’effacer avec l’arrivée des nuages. Je le reprends ensuite.
Instant zen.
Jean Sebillotte
PS – Pour ceux qui auraient fait de ce texte à peine publié une première lecture, qui en auraient vu les imperfections, je précise que je l’ai déjà repris pour en améliorer la forme. Ainsi s’écrivent mes rubriques : avec des ratures et des repentirs.
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septembre 11th, 2013 par Jean Sebillotte
Le livre de Klein et Perry-Salkow incite à la recherche. Je me s’y suis mis à partir de mon nom complet, soit Jean Marcel Sebillotte. Surprise : la tâche a été terrible ! Il m’a fallu des heures et des heures pour aboutir aux deux anagrammes que voici : Mollet, je crains la bête et
Ça ! Le Nil je l’embrase tôt !
Le troisième est-il digne de ma recherche ? Billotte, j’en écrase mal, car billotte ne figure pas au dictionnaire, que je sache à moins de citer des personnes plus ou moins célèbres, et j’en écrase est quelque peu familier et argotique !
Dans leur livre, les auteurs ne nous disent rien de leur travail. Comment s’est-il effectué ? Quelle méthode utiliser ? Le recours aux formules mathématiques a-t-il aidé ces scientifiques ? Comment ont-ils choisi leurs sujets. L’anagramme qu’il retiennent pour leurs noms les éloigne du français…Leur était-il possible d’en trouver un dans notre langue ? Le K et leW ne sont pas faciles à utiliser !
Quel usage faire de ces résultats ? Je propose le texte suivant :
« Mollet je crains la bête. Peu costaud et peut-être timoré, je fuis et redoute l’animal dur et brutal. Je ne parais guère courageux, mais j’avoue tenir à mon intégrité. À quoi me servirait l’estafilade d’une corne de taureau, la morsure d’un requin, le coup de patte d’un ours ? » Voilà ce que me raconta Jean Marcel Sebillotte en veine de confidences. Il ajouta : « je rêvais ce matin même être en Égypte et incarner le soleil levant. J’étais le dieu Ra au petit matin et me disais : Ça ! Le Nil je l’embrase tôt. Je me réveillais tout heureux et fier de mon pouvoir ! »
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août 31st, 2013 par Jean Sebillotte
Ce livre d’Agnès Desarthe, je l’ai ai acheté par pure impulsion. C’est un livre tout récent, paru en juillet 2013, d’une romancière que je ne connaissais pas. Il m’a passionné. Et voici pourquoi :Agnès n’aime pas lire. Elle aime écrire. Elle veut, très jeune écrire.
*
Étonnante expérience qu’elle relate avec brio. Je ne relate ici qu’une petite partie de sa vie. La voici en khâgne au lycée Fénélon, admise car bonne angliciste.
― Je suis là pour l’argent…dit-elle…Il faut souffrir pour être riche,…Je suis prête à tout…
Agnès a comme professeur madame Barberis, apôtre du structuralisme. La bibliographie qu’il faut étudier comporte une soixantaine de titres. Agnès sait qu’elle ne les lira pas. En cours, Mme B. fait étudier la casquette de Charles dans Madame Bovary !
― Je constate que Flaubert est fou. Fou comme Marguerite Duras…En rentrant chez moi j’ouvre un cahier et me mets à copier, à la main et mot à mot, Madame Bovary…je vais apprendre à lire…l’horizon s’élargit…
Plus loin :
― Des années durant, j’ai refusé de lire parce que mon grand-père maternel a été déporté, parce que la famille de mon père a été contrainte de quitter la Lybie, puis, l’Algérie, parce que malgré nos efforts, nous n’étions jamais suffisamment français…parce que la lecture…a été associée à la France, la France du terroir… « D’où écrit-on ? » me revient avec une violence, une vigueur nouvelle. « D’où lit-on » m’entends-je y répondre.
Plus loin encore :
― En sortant de ma classe de khâgne, à dix-neuf ans, je ne dis plus que je n’aime pas lire. Ce n’est plus vrai…
Et,
― À l’École normale supérieure, je m épanouis comme jamais…à partir de la découverte de Singer, je me mets à pouvoir tout lire. Un verrou a sauté…Je deviens une lectrice compulsive…
*
Voilà ce qui m’a passionné dans ce livre : l’étrangeté d’un parcours ! C’est page 120 que se situe le sommet. Après, ce sont des analyses puis la traduction :
―…j’ai traduit un livre qui a changé ma vie.
*
Je reviendrais sur un autre passage dans un autre article. Pourquoi ne pas essayer de le lire ce livre ? Le lire, même si l’on n’est pas lecteur compulsif ?
Jean S.
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mars 2nd, 2013 par Jean Sebillotte
L’auteur écrit ici des textes qui sont des petites merveilles de poésie en prose, ou de courts récits poétiques. Le livre est illustré de petites phrases manuscrites comme celle de la couverture. Dans le corps du texte j’ai relevé ceci :
« J’ai lu plus de livres qu’un alcoolique boit de bouteilles. Je ne peux m’éloigner d’eux plus d’un jour…Le poète qui a repeint les appartements du paradis et de l’enfer, je sors ses livres du buffet où ils prennent une teinte d’icône…et délivre deux enfants dont j’époussette le costume avant de les laisser courir dans la lumière…Dante descend aux enfers comme on descend à la cave chercher une bonne bouteille… »
Ces phrases sont extraites de Vita Nova.
Un carnet aux pages bleues, inséré au milieu du livre, est dédié à sa femme, « la plus que vive. »
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