février 11th, 2018 par Jean Sebillotte
Musardant dans un petit livre sur Montaigne, je recopie certains passages de cet auteur et m’empresse de vous les communiquer :
« Les livres sont agréables ; mais si à force de les fréquenter, nous finissons par perdre la gaieté et la santé, qui sont nos plus grandes qualités, abandonnons-les. Je fais partie de ceux qui pensent que le fruit qu’on en tire ne saurait contrebalancer la perte qu’ils nous occasionnent. Ainsi les hommes qui se sentent depuis longtemps affaiblis par quelque indisposition finissent par se rendre à la merci des médecins et demandent à l’art de la médecine de leur donner certaines règles de vie pour ne plus les enfreindre : de même celui qui fait retraite, ne tirant qu’ennuis de la vie en société dont il a perdu le goût, doit régler sa nouvelle vie selon les lois de la raison, l’ordonner et l’arranger en y réfléchissant bien et en usant de son jugement. Il doit avoir pris congé de toute espèce de peine, quelque soit son aspect ; et fuir sans exception les passions qui font obstacle à la tranquillité du corps et de l’âme en choisissant la voie qui conviendra le mieux à son caractère…………….
…….Qu’il s’agisse de diriger sa maison, de l’étude, de la chasse ou de toute autre occupation, il faut aller jusqu’à l’extrême limite du plaisir, en se gardant de s’engager au-delà, en ce point où la peine commence à se mêler au plaisir…………………
…..Je n’aime, pour ma part, que les livres agréables et faciles, qui me chatouillent l’esprit, ou ceux qui me consolent et m’aident de leurs conseils à régler ma vie et ma mort :
« Me promenant silencieusement dans les bois sombres et m’occupant des questions dignes d’intéresser un sage et un homme de bien » (citation d’Horace) …………..
….Il faut retenir avec nos dents et nos griffes l’usage des plaisirs de la vie, que les ans nous arrachent des poings les uns après les autres :
« Cueillons les plaisirs ; nous n’avons
Que le temps de notre vie : un jour tu seras
Que cendre, ombre, un vain mot » (citation de Perse) »
J’ajoute que pour ceux qui ignorent qui est Perse (ma source est Wikipedia !) : Perse grandit dans une famille appartenant à l’ordre équestre et apparentée à de hauts représentants de l’ordre sénatorial. Sa famille compte des ancêtres étrusques, comme en témoigne notamment le praenomen de Perse, Aules (encore influencé par l’étrusque Aviles, et non Aulus comme en latin). Il fait ses études dans sa ville natale jusqu’à l’âge de douze ans. Il gagne ensuite Rome pour y étudier la grammaire et la rhétorique auprès du grammairien Remius Palaemon et de Virginius Flaccus. Il côtoie le philosophe stoïcien Cornutus, Lucain ou encore Sénèque. C’est Cornutus qui lui inspira l’amour de la vertu et exerça sur lui la plus grande influence, presque égale à celle d’un père qu’il perdit très jeune. Perse mourut en 62, à l’âge de vingt-huit ans, d’une maladie d’estomac.
A bientôt mes ami.e.s. (horreur de cette prétention actuelle !)
Jean
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septembre 3rd, 2015 par Jean Sebillotte
L’an passé j’ai lu Les Travailleurs de la mer. Qui le lit encore ? J’ai apprécié ce livre à mille lieux de Vercel.
Quand vous parlez à un de vos amis des romans de Victor Hugo, ils vous citent volontiers Les Misérables. Ils cherchent dans leurs souvenirs et vous citent Cosette, Jean Valjean, les Thénardier… Ils se rappellent avoir lu ça.
1500 pages
Quand un copain chargea le roman sur ma liseuse (qu’il avait remise à jour), je découvris que l’œuvre avait cinq tomes sous-titrés : Fantine, Cosette, Marius, L’idylle rue Plumet et l’épopée rue Saint-Denis, et Jean Valjean ! C’est dire l’ampleur de l’ouvrage ! En livre de poche cela représente 1500 pages ! Il y a dans ces tomes des livres et des chapitre avec des titres. L’oeuvre est cloisonnée, articulée, cohérente et immense.
Si vos amis se souviennent du roman, je doute qu’ils l’aient lu. Je pense qu’ils en ont eu connaissance par des extraits scolaires. Au mieux ils auront lu une édition abrégée. Il en existe ! Je commençais par le tome 1. J’eus droit à quelques 70 pages sur l’évêque de Digne et sur tout son diocèse. Pages qui m’ont passionné où apparaît soudain Jean Valjean libéré du bagne. À la fin du tome, on finit par Fantine, mère de Cosette. Même procédé pour le tome suivant où on apprend tout de la bataille de Waterloo et ou arrive un certain Thénardier, détrousseur de cadavres. Etc.
Hugo adore partir dans de longues digressions, de très longues digressions et nous enseigner l’Histoire à sa façon que je trouve étonnante de précision, d’invention et… de poésie. Il en rajoute à plaisir, tartine des portraits, abuse des mots, utilise des adjectifs ronflants. Il en rajoute, se complaît dans de longues énumérations.
J’avoue cependant avoir accéléré la lecture en sautant les trop longues descriptions de lieux, de personnages, de costumes, de personnages. Hugo adore écrire des discours sur tout. Il en rajoute volontiers !
Et puis c’était l’été et j’avais tant de choses à faire.
Le contexte de la rentrée littéraire
En ce moment, le monde des lettres bruisse de nouvelles sur les livres de la rentrée. La saison des prix commence.
Pas question pour moi de me lancer dans une quelconque analyse de cette oeuvre qui a été l’objet de tant de travaux. J’ai lâchement fait un tour sur Wikipedia. Je livre ici un passage éloquant que je copie ici.
« Les deux premiers tomes des Misérables sont publiés le 3 avril 1862 à grand renfort de publicité, extraits de morceaux choisis dans les journaux et critiques élogieuses. La suite paraît le 15 mai 1862. À cette époque, Victor Hugo est considéré comme un des premiers hommes de lettres français de son siècle et le public se précipite pour lire son nouveau roman.
Les réactions sont diverses. Certains le jugent immoral, d’autres trop sentimental, d’autres encore trop complaisant avec les révolutionnaires. Les frères Goncourt expriment leur profonde déception, jugeant le roman très artificiel et très décevant. Flaubert n’y trouve « ni vérité ni grandeur ». Baudelaire en fait une critique très élogieuse dans les journaux, mais en privé le qualifiera de « livre immonde et inepte ». Lamartine en condamne les impuretés de langue, le cynisme de la démagogie : « Les Misérables sont un sublime talent, une honnête intention et un livre très dangereux de deux manières : non seulement parce qu’il fait trop craindre aux heureux, mais parce qu’il fait trop espérer aux malheureux ». Cette crainte est partagée par Barbey d’Aurevilly qui stigmatise le « livre le plus dangereux de son temps ».
Le livre acquiert cependant un grand succès populaire. Traduit dès l’année de sa parution en plusieurs langues (italien, grec, portugais), il reçoit dans ces pays, de la part des lecteurs, un accueil triomphal. »
N’est-ce pas savoureux ? Les grands de la littérature ne sont guère tendres entre eux !
Le point de vue du romancier que je deviens progressivement :
Je ne prétends à aucune science. Je m’étonne cependant de découvrir un roman gigantesque de liberté. Fallait-il qu’Hugo soit déjà célèbre pour être ainsi édité. De nos jours, un tel ouvrage retiendrait-il l’attention d’un éditeur ?
Il me semble que le roman, tel qu’il est conçu actuellement, doit être assez court et surtout ne pas contenir de développements qui feraient plaisir à l’auteur mais qui ne sembleraient pas être au service de l’intrigue. Foin des passages un peu philosophiques, un peu historiques, qui sentent l’essai. Nous n’aimons pas non plus les longues descriptions.
N’est-ce pas ça le problème ? Il y a un genre et il faut le respecter : roman, polar, récit, biographie, livre d’histoire, livre de philosophie, à chacun son contenu ! Ainsi « Le royaume », ce succès récent de librairie, a gêné. Était-ce un roman, une autobiographie, un essai ? Se piquait-il d’histoire, de science religieuse ? Il est un peu tout ça et cela a perturbé des lecteurs qui me sont proches.
Merci donc Victor Hugo de ton roman qui mélange pas mal de genres…
Comment conclure ?
Je ne vois qu’une chute à mon papier : lisez Victor Hugo, c’est un régal ! Mais c’est long !
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février 23rd, 2013 par Jean Sebillotte
L’Echo des Nouettes, sur le quel j’ai déjà écrit dans ce blog, a consacré son dossier à la lecture. J’en étais co-auteur. Voici un des articles qui se veut portrait d’une lectrice mis en parallèle avec neuf groupes de lectures recensés dans le quartier.
La lecture « plaisir solitaire ? »
Notre lectrice, que nous appellerons M., propose elle-même cette expression en souriant, au cours des deux grandes heures passées à échanger sur livres et lectures.
Plaisir…
M. le prend dans des livres appréciés au regard de multiples critères, le style en premier lieu, puis la réflexion ou le regard posé sur le monde actuel et l’exploration de mondes inventés ou de pays réels de toutes sortes. L’histoire, l’intrigue comptent aussi. Parfois l’auteur agace par ses partis pris. Depuis peu M. peut abandonner un livre en cours de route, ce qui est une liberté conquise sur la révérence passée qu’elle accordait aux auteurs !
A ces critères correspondent un grand nombre d’auteurs français et étrangers ? En réalité nous évoquons essentiellement des auteurs étrangers écrivant des romans « traditionnels », de la science-fiction, et de la fantasy, des romans policiers. Citons pêle-mêle Cormac Mac Carthy, Jonathan Coe, Jane Austen, K. Blixen, Mankell, E. Georges, Doris Lessing, S. King, Herbert de « Dunes, » le groupe de Missoula, Toni Morisson… Inutile d’évoquer les livres rejetés ! Notre lectrice assume ses choix qu’elle juge « éclectiques » et personnels.
…Solitaire
Parler de livres, échanger, conseiller, quel plaisir, mais participer à un groupe de lecture ? Inutile. A raison d’un livre par semaine, M. a amplement de quoi lire et n’a pas besoin d’être incitée à ouvrir un bouquin !
N’a-t-elle pas hérité de la soif de lecture de sa famille et ne l’a-t-elle pas pratiquée dès l’enfance, à la lampe de poche sous ses draps pour échapper à l’œil parental ? Après les ouvrages enfantins et ceux des bibliothèques accessibles, il y eut ceux que son père (en province alors) faisait venir, les Dumas, Orczy, Cooper, puis plus tard les Kessel, Vercel, Kipling, Dickens. Il y eut l’attrait du fuit défendu, soustrait au père, le « J’irai cracher sur vos tombes » de B. Vian,
« L’heure joyeuse » a joué un grand rôle dans son passé de lectrice à Versailles. Il y eut là ce moment béni où M. se sentit appartenir à une communauté en lisant dans un ouvrage la mention d’un livre déjà lu ! Est-on solitaire avec ce sentiment de communier avec tant d’autres dans la même passion, le même besoin ?
Et le livre ?
Objet culte, irremplaçable, acheté de façon compulsive à la FNAC ou ailleurs (d’où l’intérêt de la bibliothèque de la Maison de Quartier pour éviter l’orgie), décliné en cinq-six bouquins à avoir près de soi en permanence, le livre est l’alcool du lecteur, son addiction.
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