S’il y a quelque chose qui s’apprend c’est bien le journalisme. Il y a des écoles pour cela. Et pourtant, dans ma vie j’ai exercé, avec d’autres, cette tâche sans formation. Il me semble avoir appris tellement sans en avoir reçu la formation adaptée…à commencer par l’enseignement. Mais ceci est une autre histoire.
Mon premier article de journal a été écrit pour « La France agricole. » J’ai gardé longtemps cet article dont le titre devait être « L’investissement est nécessaire mais peut conduire à la faillite ». Le texte me venait de mon expérience de conseiller de gestion. Il visait un ami agriculteur et partait de son cas, maquillé bien entendu.
Plus tard, je fus conduit à lancer un « Echo des Nitrates. » Ce fut sur ordre. Il consistait en une feuille recto-verso tirée au ministère de l’environnement et routé par une entreprise. Mes collaborateurs et moi l’avons fait paraître pendant plus de 10 ans à raison de 10 numéros par an. Exercice de concision, choix des thèmes à traiter, illustrations parfois…
A ma retraite j’ai été invité à participer à l’Echo des Nouettes. J’étais poursuivi par les « Echos ! » Ce journal de quartier m’a appris beaucoup. Il a maintenant son site http://echodesnouettes.org/ créé par Alain Roger. On peut y trouver, en archives, quelques numéros. Les autres seront progressivement scannés. Le numéro 50 va paraître en juin. C’est là un vrai journal qui parait trois fois par an et qui a pour limite le seul quartier de Porchefontaine à Versailles. Sans vantardise, on peut affirmer que c’est là une expérience unique en France. Il existe des journaux de quartier qui sont tout à fait respectables mais qui ont souvent pour support une paroisse, une municipalité qui sont distribués et non vendus..Le nôtre est un vrai journal. Son support : une association. Sa conception : une équipe de journalistes bénévoles la réalise. Son indépendance : elle est totale, assurée par des recettes suffisantes obtenues par la vente des numéros et la publicité acquise dans le seul quartier. Son orientation : apolitique et a-confessionnelle. Sa vocation profonde : renforcer les liens entre habitants du quartier et participer à son animation. Sa maquette : délibérément « presse people. » Nous bénéficions d’une aide minime mais précieuse de la municipalité et, surtout, de l’appui de l’imprimerie de notre quartier pour la mise en page et l’impression en bichromie de quatre pages sur huit sur papier couché. Des commerçants vendent notre journal prolongeant nos ventes, notamment sur le marché et à la sortie des écoles. Des abonnés nous soutiennent.
Sur un plan plus personnel, j’ai la chance de pouvoir participer à l’illustration de certains numéros, notamment de la rubrique que je tiens depuis plusieurs années (Balcons et jardins). Sinon je suis mobilisé pour des dossiers ou par tel ou tel évènement. Il m’est arrivé de publier des poèmes.
Un exemple d’illustration ? Un collègue vient de m’écrire : « Je te propose le poème onirique publié dans l’Echo 41, une « rencontre bien singulière »…Mais est-ce vraiment un rêve? Ce très court poème en prose a une demi-douzaine d’interprétations possibles. Le texte ne propose que de rares et insuffisantes pistes. A chacun de se faire son opinion. Tu pourrais rajouter ton excellente illustration de l’époque. » Peut-on refuser une telle demande ?
Une rencontre bien singulière
C’était un soir d’été entre chien et loup à la fontaine des Nouettes.
La clairière est déserte. J’entends soudain des voix mélodieuses qui s’approchent. De mon abri, je vois sortir de la forêt une colonne de femmes en longue robe blanche, une couronne de fleurs dans les cheveux. Elles sont douze et font cercle autour de la fontaine en chantant et en jetant des pétales de fleurs. Le temps semble s’être arrêté. Il n’y a pas un bruissement de feuilles. Tout est silence à côté des incantations dont le sens m’échappe. Les esprits de la forêt retiennent leur souffle. Seuls quelques lueurs illuminent la couverture nuageuse, des éclairs sans tonnerre sans doute. Puis, les dames repartent en sens inverse vers les futaies. Elles semblent glisser sur l’herbe plutôt que marcher. Un instant plus tard elles ont disparu.
A mon tour je m’approche de la fontaine. Il flotte une sensation de calme et de sérénité, et même une légère odeur de jasmin. La fontaine paraît bouillir alors que l’eau est glacée. On aurait dit les prêtresses de la forêt de Brocéliande venues rendre hommage aux pouvoirs magiques de la fontaine de Barenton ou encore une apparition de la déesse gauloise Epona et de ses suivantes. Cette scène est-elle sortie du passé ? Du futur ? Cette manifestation a-t-elle bien eu lieu ce soir et comment l’interpréter ?
Enfin, une légère brise revient, on entend de nouveau les oiseaux. La clairière respire normalement, le ciel est clair, la nature reprend ses droits, les bruits familiers du quartier se manifestent au loin.
Cependant, trois pétales de rose glissent encore à la surface de l’eau…
Michel Duthé
Merci Jean.
Je te propose quelques commentaires un peu immodestes puisque je me risque à faire l’exégèse de mon court texte.
1) L’auteur a pu tout simplement dormir et rêver. A noter toutefois que le rêve est resté ancré précisément dans la mémoire.
2) Certains lieux gardent la mémoire des événements marquants et restituent la scène dans certaines conditions. Cela s’apparente à un phénomène de hantise. Ainsi des témoins ont pu observer des scènes de bataille dans la campagne de Gettysburg. La fontaine a pu être témoin de réunions celtes cultuelles.
3) Les dieux et déesses antiques ont eu leur part d’apparitions. Les apparitions mariales n’ont fait que poursuivre la tradition. La déesse Epona était la protectrice des chevaux et la patronne des cavaliers. Peut-être a-t-elle été attirée par l’odeur forte émanant du centre hippique tout voisin…
4) Reste la solution classique de la rencontre du troisième type. Les ufologues auront reconnu les indices cohérents avec les nombreux témoignages allant dans ce sens.
L’OVNI est stationnaire au-dessus de la clairière, silencieux, émet des lumières, semi-caché au sein d’un nuage artificiel.
Les personnages ne marchent pas mais glissent au-dessus du sol. Ils disparaissent brusquement pour réintégrer l’OVNI dès qu’ils se sentent observés.
Dans le champ proche de l’OVNI tout est silence. On se trouve dans la bulle spatiotemporelle où la vitesse de défilement du temps est considérablement ralentie, condition nécessaire au système de déplacement et de défense de l’OVNI. Le son revient dès que l’OVNI s’éloigne.
Les personnages ont, certes, un air plutôt familier, mais, d’une part, le cerveau interprète l’inconnu en fonction de ce qu’il connaît (avant les soucoupes volantes, les témoins voyaient des zeppelins, nos anciens des chars ailés, d’autre part, parmi la trentaine d’espèces qui nous visitent, on recense « les grands blonds », un genre scandinave de deux mètres, femelles assorties.
Alors, quoi d’autre? A chacun de juger.